Tn. Voilà, en deux lettres, comment les jeunes de banlieue ont longtemps exprimé leurs multiples revendications, souvent légitimes, à travers la pointe d’un style vestimentaire bien à eux, presque signature. La Air Max Plus, de son vrai nom, a en effet été massivement adoptée par les amateurs de baskets âgés d’une vingtaine d’années environ et issus des cités à la fois de région parisienne et de partout ailleurs en France. Et ce dès le lancement de la silhouette par Nike en 1998. Eh oui, la Tn, comme elle est encore couramment appelée, a vu le jour il y a maintenant plus de 30 ans et une bonne dizaine d’années après la Air Max 1 de Tinker Hatfield. Depuis son introduction sur le marché, impulsée par Foot Locker chez qui elle fût initialement commercialisée en exclusivité, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Si la plus agressive des chaussures à bulle reste attachée à ses racines urbaines, elle fait l’objet d’une attention grandissante de la part des designers de la marque au Swoosh qui s’efforcent en quelques sortes de redorer son blason afin de lui permettre de s’élever enfin à la hauteur de son rang.
Nike Tn, aux origines du succès de la Air Max Plus.
La Tn est donc sortie de terre en 1998. Elle est l’œuvre de Sean McDowell, un designer que nous pourrions qualifier aujourd’hui d’artiste, à l’instar de ses prédécesseurs, car ce qui fût envisagé à l’époque comme une énième chaussure de course destinée à assurer la suprématie de Nike sur le marché du running s’est érigée rapidement comme une icône de la mode streetwear.
Pour s’affranchir si facilement des codes du sport, la Air Max Plus, aka Tn, a pu compter sur le soutien inconditionnel d’un public jeune, naturellement rebêle, pour qui le style vestimentaire a toujours fait partie intégrante des codes à respecter, ou tout du moins suivre, pour survivre à la dure loi de la cité. Elle s’est imposée en outre comme l’une des composantes incontournables de « l’uniforme des banlieues ». Conformément à ce que nous expliquions précédemment, la Tn avait pourtant était pensée par Sean McDowell pour un tout autre usage : le running. Et autant dire qu’avec sa structure aussi légère que respirante, ainsi que l’apport de la technologie Tuned Air à laquelle elle doit son surnom, la célèbre Air Max de 1998 avait tout pour connaître un destin doré aux pieds des coureurs.
Mais son esthétique avant-gardiste, inspirée notamment des stries que l’on retrouve sur les feuilles de palmier, une particularité de la flore floridienne si chère à Sean McDowell, en a décidément autrement. Une esthétique déclinée en prime dans une poignée de coloris réputés agressifs, à l’image de la mythique Tn ‘’Requin’’, qui ont accéléré son émancipation dans la rue, loin des pistes de course auxquelles elle était promise. A tort ou à raison ? Nous vous laissons la liberté de considérer l’essor de la Air Max Plus comme bon vous semble.
30 ans après sa création, comment la Tn se réinvente-t-elle ?
Que vous soyez un fan inconditionnel de baskets, c’est-à-dire un sneakers addict, ou un acheteur occasionnel de chaussures de sport qui aspirez à profiter davantage d’un confort optimal que d’un style à la pointe, vous avez certainement remarqué que la Tn est toujours au rendez-vous, 30 ans après sa création. Pour cela, la Air Max Plus n’a eu d’autres choix que de se réinventer avec en ligne de mire une clientèle plus seulement acquise à sa gloire.
Dans l’optique de séduire un public différent mais non moins connaisseur pour autant, et s’imposer ainsi à la fois auprès des hommes et des femmes au fait des dernières tendances en matière de sneakers, Nike a tout d’abord misé sur une stratégie dont l’efficacité n’a plus à être démontrée : les collaborations. La firme de Beaverton s’est entourée en 2020 de Supreme, l’un de ses partenaires historiques, pour insuffler un vent de fraicheur sur le design culte de Sean McDowell. Les 3 coloris inédits et évidemment limités qui ont découlé de ce nouveau travail collaboratif entre Nike et Supreme ont immédiatement trouvé preneur. Signe de l’engouement qu’ils suscitent encore, leur prix d’origine demeure au minimum doublé sur les sites de revente de sneakers de référence, à l’image de StockX et Wethenew. La déclinaison ‘’Fire Pink’’ peut même atteindre le millier d’euros dans certaines pointures. L’opération a eu un impact indéniable sur l’image du modèle. Dans la foulée et sur un autre plan, l’édition ‘’Atlanta’’ de la collection ‘’City Special’’ a permis pour sa part d’achever le processus de démocratisation de la Tn auprès des femmes. Comment aurait-il pu en être autrement avec une finition rose féminine par excellence ?
Plus récemment, Nike nous a gratifié d’une multitude d’autres associations de couleurs home-made tout aussi efficaces. Comment ne pas citer la Tn ‘’FFF’’ qui a connu un succès fou lors de sa release avant la Coupe du monde de football 2022 au Qatar ? Idem pour la version ‘’Mica Green’’ pour femme. Par ailleurs, des itérations aussi simples qu’efficaces font plus que jamais l’unanimité. En attestent la très forte demande pour la Air Max Plus ‘’Triple White’’ et son alternative ‘’Triple Black’’.
La bonne nouvelle pour ses fans de la première heure, c’est que la Nike Tn a su se réinventer ainsi sans tirer un trait sur ses origines. C’était d’ailleurs l’une des règles qu’a imposées le géant américain à aux équipes créatives chargées de maintenir la silhouette dans la course, dans la mesure où celui-ci a assumé dès le départ le fait que sa Tn soit cataloguée par l’opinion publique comme une « chaussure de racailles ». Nous assistons de fait en parallèle à la recrudescence de nouvelles empreintes imaginées quant à elles pour un public plus aguerri. La sortie en 2022 de la Air Max Plus ‘’France’’ en est assurément la meilleure illustration. Avec son design inspiré des grillages qui cloisonnent les banlieues parisiennes et surtout le chiffre 93 floqué sur ses languettes frontales, en référence au département de Seine-Saint-Denis, berceau de son essor en France, la paire n’a pas trainé longtemps sur les étals de l’équipementier.